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La renaissance de La Foux

  • Photo du rédacteur: Tom Richardson
    Tom Richardson
  • 4 juin
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 31 juil.


Fontaine des années 1930 marquant la source de la Foux, Grasse
Fontaine des années 1930 marquant la source de La Foux, à côté du monument Napoléon sur la place de la Foux

Sans la source de *La Foux, Grasse n'existerait pas. Pendant dix siècles, elle a alimenté la ville en eau pour la boisson, la lessive, le tannage, l'énergie des moulins et tous les besoins vitaux.


Ce n'est qu'au XXe siècle que les problèmes de pollution et de débit réduit le rendirent quasiment inutilisable. Aujourd'hui encore, il est facile d'observer comment les canaux qui le parcouraient ont façonné la ville, à travers ses fontaines, ses lavoirs et ses canalisations.


Pendant la majeure partie du siècle dernier, La Foux n'a contribué qu'à peine à l'approvisionnement en eau de Grasse. Cependant, une nouvelle station d'épuration vient d'être construite, permettant à la source de redevenir une source importante d'eau potable pour la région. Elle est située juste en face du parking de La Foux, quelques mètres au-dessus de la jolie fontaine des années 1930 qui marque aujourd'hui la source.


Un réseau de chaînes

Les ingénieurs du Moyen Âge et du début de l'ère moderne étaient très compétents. Au fil du temps, ils ont créé un réseau de canaux à travers la ville.

Carte de la vieille ville de Grasse superposée à un ancien réseau de canaux d'eau
Carte montrant les canaux existant en 1830 (tirée d'un relevé effectué cette année-là et conservé aux archives municipales) superposée au tracé moderne des rues de la vieille ville.

Aucun pompage n'a été nécessaire : les canaux suivaient les contours du promontoire de Grasse, à flanc de massif de Roquevignon. Un diagramme des hauteurs (en mètres) de différents points de la vieille ville montre que, depuis la source originelle de La Foux, au nord de la ville, jusqu'au bout de la rue Tracastel, au sud-est, le terrain s'incline de 50 mètres.


Même la petite butte du Puy, sur laquelle se dresse la cathédrale, se trouve à 30 mètres en dessous de la source.

Hauteur de différents points de la vieille ville de Grasse
Hauteur (en mètres) à différents endroits de la vieille ville. Approximativement du nord-ouest au sud-est.

Fontaines

Il y aurait (je ne les ai pas toutes comptées !) une quarantaine de fontaines dans la vieille ville. La plupart sont de simples bassins, parfois légèrement décorés, mais plusieurs sont plus élaborées. La fontaine typiquement provençale de la place aux Aires (construite en 1821), avec ses multiples bassins, et celle de la place aux Herbes, avec son haut poteau, sont particulièrement remarquables. La fontaine de Thouron, datant de 1887, avec son double escalier, est également remarquable.

Fontaines de Grasse : Place aux Herbes ; Place aux Aires ; Hôtel de Ville (Palais des Évêques) ; Thouron
Fontaines, dans le sens des aiguilles d'une montre à partir du haut à gauche : Place aux Herbes ; Place aux Aires ; Hôtel de Ville (Palais épiscopal) ; Thouron

Le plus grand point d'eau de tous est la Fontaine de l'Évêché, qui coule à l'emplacement des fortifications d'origine du Xe siècle. On dirait presque que l'eau coule des caves de l'hôtel de ville (l'ancien palais épiscopal) situé au-dessus.

Fontaine de l'Evêche, Grasse, décorée pour l'Expo Rose, le 9 mai 2025
Fontaine de l'Évêché, décorée pour l'Expo Rose, le 9 mai 2025

Il y a au moins autant de fontaines aux abords de la vieille ville. Celle du cours Honoré Cresp est intéressante car elle date de la Révolution. Son texte et sa symbolique rappellent l'Italie sous Mussolini, ou peut-être l'époque communiste en Europe de l'Est. Il s'agit avant tout du « bien de l'État » et de la « défense du pays ». La fontaine a été construite à l'origine sur le cours, mais elle a été déplacée (et même ailleurs pendant une courte période), ce qui explique probablement pourquoi elle n'est plus alimentée en eau. Je pense qu'elle mérite de redevenir une fontaine et d'être mieux connue comme un vestige d'une autre époque.

Fontaine du Cours, Grasse, datant de la Révolution.
Fontaine du Cours, datant de la Révolution. (à gauche) L'inscription sur la face sud-est signifie « Prospérité de l'État » et celle sur la face sud-ouest « Richesses du peuple », tandis que (à droite) les inscriptions sur les faces nord-ouest et nord-est symbolisent respectivement « Défense du pays » et « Arts et nature ».

D'autres fontaines se trouvent dans d'anciennes demeures privées. Celle du remarquable jardin du musée Fragonard montre qu'elles étaient souvent au cœur des projets du XVIIIe siècle.

Jardin du Musée Jean-Honoré Fragonard au 14, rue Jean Ossola, Grasse
Jardin du musée Jean-Honoré Fragonard au 14, rue Jean Ossola. Dommage que l'horrible bâtiment de la Poste des années 60 à l'arrière s'immisce dans l'image !

Lavoirs

Quelques petits lavoirs parsèment aujourd'hui la ville (par exemple, bd Gambetta, presque dissimulés dans le mur d'enceinte), mais il y en avait autrefois trois grands près de La Foux. L'un se trouvait sur la place de la Buanderie, près de l'actuelle gare routière, et un autre à l'emplacement actuel du théâtre. Le dernier vestige de ce dernier est une fontaine nichée dans le mur du théâtre.


Tous étaient plus grands que ceux que nous connaissons aujourd'hui, mais le plus grand des trois était celui de la Grande Foux. Avec près de 60 mètres de long, il pouvait accueillir de nombreuses ménagères, comme le montre la carte postale de 1905. Il fut démoli en 1943.

Grasse, Grand Foux Lavoir, 1905
Grand Foux Lavoir, 1905. Deux des bâtiments visibles sur cette carte postale existent encore aujourd'hui, le 5 Terrace Tressemannes à gauche et le 2 av Thiers à droite.
Escalier d'eau de la place Morel descendant vers la médiathèque Charles Nègre, Grasse
Marches d'eau de la place Morel menant à la médiathèque Charles Nègre.

Conduits

De nombreux canaux anciens courent encore sous les rues de Grasse, presque tous à ciel ouvert à l'origine. Lors de la rénovation de la place du Lieutenant Morel, dans l'ancien quartier des tanneurs Rouachier, dans le cadre de l'aménagement de la Médiathèque, les concepteurs ont intégré un nouveau canal ouvert descendant les marches, en clin d'œil à l'histoire de Grasse.


Gestion et déclin

Le débit de l'eau de La Foux a toujours été régulé pour la partager, et le risque de pollution était connu depuis longtemps. Un édit de 1455 interdisait le lavage de la laine par crainte de polluer l'eau. Un registre municipal de 1568 indique qu'un « aguadier » était chargé de surveiller l'utilisation de l'eau. Les archives municipales comprennent une analyse de la qualité de l'eau de 1892 et un relevé des taux d'utilisation de 1918. Un autre dossier d'archives de 1937 contient de nombreuses plaintes concernant l'eau des canaux de la ville qui s'infiltrait dans des locaux commerciaux et domestiques.


Mais dès la seconde moitié du XIXe siècle, le débit de la Foux devint insuffisant pour les besoins de la ville. Lorsque Grasse aménagea une nouvelle source, le Foulon, en 1889, l'eau de la Foux perdit de son importance. Comparer les débits est un peu difficile, car les données anciennes sont principalement exprimées en litres par seconde, tandis que les calculs modernes sont en mètres cubes par heure. Il semble que la Foux fournissait 100 litres par seconde en 1850, lorsque la « bataille pour l'eau » avec Cannes (voir mon blog ici ) débuta. Le Foulon fournissait bien plus de 200 litres par seconde lors de sa mise en service en 1889, et en 1918, la Foux n'était exploitée qu'à 50-55 litres par seconde.

Source de la Foux. Production et utilisation en 1908
Source de la Foux : statistiques d'utilisation en 1918. Le débit total était de 50 à 55 litres/seconde, dont 22 litres étaient vendus par abonnement, 5 litres fournis à des particuliers (grandes maisons) et 20 litres destinés à l'usage public. Archives de Grasse.

Une pollution naissante, révélée par l'échec du projet de reboisement du Roquevignon en 1929 pour assainir l'eau, a également réduit son attrait. En 1937, il a été conseillé aux usagers de faire bouillir l'eau avant usage personnel et, en 1960, elle a été déclarée impropre à l'usage domestique.


En 1984, lors de la construction du parking de La Foux, seuls 25 litres/seconde (90 mètres cubes/heure en langage moderne) du débit étaient captés dans une nouvelle conduite et dirigés vers le réservoir des Trois Portes, situé sur la colline de Saint-Hilaire, pour y être traités. Le reste de l'eau retombait dans la vallée en contrebas.


Résurrection

À mon arrivée à Grasse en 2000, l'Hôtel des Parfums, au design moderne et sans prétention, se dressait au-dessus du parking de La Foux. En 2021, des travaux liés à sa rénovation ou à son remplacement ont indirectement révélé qu'il était possible d'extraire et de traiter un débit bien plus important de La Foux, pouvant atteindre 120 litres/seconde (430 mètres cubes/heure). L'approvisionnement de Grasse par le Foulon est actuellement d'environ 200 litres/seconde ; un tel débit augmenterait donc jusqu'à 50 % de notre approvisionnement en eau, en plus de l'eau qui alimente déjà Trois-Portes.


Au cours des dix-huit derniers mois, une station d'épuration moderne a été installée dans l'épingle de la Route Napoléon, devant le parking, dissimulée derrière des arches et des balustrades rénovées et agrémentée d'un joli plan d'eau extérieur. Le 28 mai, la ville a organisé une cérémonie d'inauguration.

Nouvelle station d'épuration des Eaux de la Foux, Grasse
Station de traitement des eaux de la Foux (à droite) avec une nouvelle fontaine (au centre de la photo).

Le département des Alpes-Maritimes a financé une partie du projet, car cela a pour effet d'augmenter l'approvisionnement total en eau du département. Pour Grasse et les autres communes de notre société locale d'eau (SIEF), dont Valbonne, il y a un avantage supplémentaire. La nouvelle source devrait réduire, voire supprimer, la nécessité d'acheter de l'eau à des tarifs élevés auprès du réseau cannois SICASIL . Grasse finira peut-être par gagner la bataille !


Les dernières estimations de débit annoncées lors de la cérémonie d'inauguration suggèrent que les projections initiales étaient probablement trop élevées. Compte tenu de la demande en eau toujours croissante, il semble peu probable que La Foux résolve tous nos problèmes de pénurie estivale. Cependant, sa renaissance non seulement ravive un élément fondamental de l'histoire de Grasse, mais constitue également une contribution concrète et, semble-t-il, rentable à la prospérité actuelle de la ville.


*Vous connaissez peut-être d'autres sources appelées « La Foux ». Cela signifie « la source » en provençal.


 
 
 

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